Si aujourd’hui on vous demandait de remplir un seau en y occupant le maximum de volume à l’aide de grains de sable, de graviers et de gros cailloux, par quoi commenceriez-vous ? Peu de chances d’arriver à nos fins en commençant par les grains de sable…
Cette parabole nous permet de mettre en lumière un questionnement que nous avons lors de nos études ACV : Contextualisée, l’ACV dans le bâtiment est-elle significative ?

Contexte

Il est facile aujourd’hui, afin de répondre aux exigences des nouveaux labels, de se lancer tête baissée dans les calculs d’analyse de cycle de vie d’un bâtiment sans lever la tête de « l’objet bâtiment ». Or il nous semble important, avant de démarrer les calculs de lever la tête et de remettre le bâtiment dans son contexte urbain : il fait partie intégrante d’un quartier, d’une ville, avec son économie, son réseau de transport, ses espaces publics etc… Le bâtiment lui-même est destiné à être habité, et ses occupants vont participer au fourmillement de la ville. Le philosophe Jean-Paul Dollé propose une définition de la ville qui fait écho à ce fourmillement : « Une ville n’est pas l’ensemble de parties, ni l’addition de fonctions. La ville c’est toujours un monde, le monde concentré dans un lieu […] ».

Dans ce sens, peut-on considérer que les émissions carbones liées à l’implantation d’un bâtiment dans une ville se limitent à celles liées à sa construction ainsi qu’à son énergie d’exploitation ? Ne nous focalisons-nous pas ici sur le grain de sable en omettant toute l’activité générée dans la fourmilière ?

 

L’usage

Recentrons-nous sur le bâtiment et ses occupants. L’expérimentation E+C- propose de comptabiliser aujourd’hui les émissions liées à l’usage du bâtiment via les consommations d’énergie associées. Il existe aujourd’hui des outils mis en place par l’ADEME[1] permettant d’estimer le bilan carbone pour un usager type d’un bâtiment. Sans être précis dans les hypothèses rentrées voici les résultats obtenus :

Rapporté par habitant, l’impact carbone des produits de construction du bâtiment représente moins d’un quart du bilan total ! Le reste concerne l’usage (chauffage, électricité, transport, alimentation etc…).

 

Les matériaux de construction

L’expérimentation E+C- propose aujourd’hui de porter une attention particulière aux matériaux de de construction en évaluant leur impact environnemental dans la construction du bâtiment. Afin de respecter les exigences du label, les bureaux d’études entrent alors dans une logique d’optimisation du bâtiment par l’utilisation de matériaux peu émetteurs de carbone. Le bois par exemple est aujourd’hui proposé comme solution « miracle » pour viser la meilleure performance possible. A la lumière de tout ce qui a été présenté précédemment, remettons le bois dans son contexte.

Sur les différentes études que nous avons pu mener, nous avons remarqué que les matériaux de construction représentaient environ 50% de l’impact carbone du bâtiment selon le référentiel E+C-. Parmi ces 50%, pour des bâtiments construits en ossature bois, ce dernier représente seulement 7% de l’impact carbone total du bâtiment. Et finalement, rapporté par habitant, le bois représente 7% de 50% de 25% de l’impact carbone lié à l’implantation d’un bâtiment neuf, soit moins d’1% !!!

 

Ouverture

Ces résultats nous questionnent finalement quant à l’atteinte des objectifs ambitieux de la COP21 de réduire à néant les émissions carbones de nos pays d’ici à 2100. Comment changer d’échelle et construire une politique de réduction de l’impact carbone en utilisant l’analyse du cycle de vie à l’échelle des territoires comme outil d’aide à la décision ? Certains chercheurs se penchent déjà sur la question[2]…

[1] http://www.bilancarbonepersonnel.org/
[2] https://www.avnir.org/FR/Analyse-du-Cycle-de-Vie-Territoriale-444.html